Faut-il toujours dire du bien des réalisations de nos enfants ?

person Posté par: Fabrice de Il était une box list Dans: Sur:

Combien de fois vous-est-il arrivé de lancer un « oh c'est beau » un peu forcé en découvrant la création que tient tant à nous montrer notre petit bout ? Et devons-nous conserver toutes ses œuvres à défaut de vexer et frustrer nos petits artistes ? Nous vous proposons ici d'explorer plusieurs pistes, car dans le domaine de l'éducation, il n'y a jamais qu'une seule vérité.

Mentir or not mentir ?

On ne va pas se le cacher, les productions de nos enfants ne sont pas toujours des œuvres d'art...

Mais faut-il pour autant lui « mentir » et le féliciter quitte à l'encourager à continuer dans cette voie ? Comment cela... vous l'avez déjà fait ??? Rassurez-vous, vous n'êtes pas les premiers, ni les derniers. Selon une étude menée en 2013 (International Journal of psychology), entre 84 et 98% des parents mentent à leurs enfants. Mais attention... ce ne sont que « de petits mensonges » ! Alors quels en sont les risques et ou se situe la frontière entre petit mensonge sans ou avec conséquence ?
Tout d'abord, partons du principe qu'il faut privilégier la vérité, on est tous d'accord. Maintenant, notre fond intérieur nous pousse parfois à privilégier un mensonge « bonne cause » afin de protéger nos enfants. Il serait tellement déchirant (et dévastateur) d'exprimer une vérité crue devant un dessin : « mais qu'il est laid ton bonhomme, en plus il n'a même pas de cou, et les couleurs que tu as choisies ne sont pas très réalistes »... Même si c'est en partie ce que l'on pense, on ne peut dignement pas restituer cette analyse aux enfants. L'instinct de protection nous conduit à enjoliver plutôt qu'à critiquer. Ce qui n'est pas plus mal pour que les auteurs prennent confiance en eux.

Valoriser un dessin est important, mais attention également à ne pas trop en faire au risque que l'enfant sur-estime ses capacités. Si sur son dessin, il manque les bras, si le soleil est en vert et si la maison n'a pas de porte... vous pouvez l'encourager en premier lieu et dans un second temps, donner votre avis en tant que personne: « si c'était moi qui avait fait ce dessin ». « Si j'avais fait cette maison, j'aurai ajouté une porte, tu sais pourquoi ? Pour que tout le monde puisse entrer et sortir » ou « si j'avais dessiné un bonhomme, j'aurai certainement fait un corps plus grand parce que mon corps à moi est plus grand que ma tête »... L'idée est donc de ne pas « critiquer » de façon à ne pas décourager, mais d’émettre un avis constructif et argumenté, expliqué. Nous développerons ces principes un peu plus tard dans cet article.

Il y a bien sûr d'autres mensonges auxquels l'enfant est confronté dès son plus jeune âge. Que ce soit le Père Noël, la petite souris ou les cloches de Pâques, ces derniers perpétuent une tradition et transportent les enfants dans un univers imaginaire. Comme le souligne Dana Castro, Docteur en psychologie, il faut plutôt voir ces mensonges comme des contes sans danger qui vont alimenter le jardin secret et l'imaginaire de l'enfant. Et ces histoires perpétuées collectivement, permettent de passer certains messages. Le Père Noël amène l'enfant à comprendre qu'il peut être récompensé s'il est sage, la petite souris invite l'enfant à prendre conscience qu'il grandit et qu'il va petit à petit passer de l'état de bébé à enfant avec des dents d'adultes. "Les enfants ont besoin de rêves, d'un espace merveilleux et le Père Noël ou la Petite Souris ne sont rien de plus que les personnages d'une belle histoire, comme d'autres héros modernes", estime-t-elle enfin. C'est aux alentours de six ans que les enfants s'interrogent et remettent en doute ces histoires. "A ce moment-là, il faut leur expliquer qu'en effet, le Père Noël n'est pas un homme comme son papa par exemple, mais le héros d'une histoire. Soyez honnêtes, ils comprendront..." conclue la chercheuse auteure de "Petits silences, petits mensonges : Le jardin secret de l'enfant".

L'enjeu se trouve donc dans l'intention derrière le mensonge. Sans en faire une solution à chaque situation, embellir une situation n'est pas mentir, surtout quand des éléments d'explications constructifs font évoluer et progresser l'enfant.

Alors quel principe adopter ?

Il y a quand même une notion à bien différencier, celle du compliment et de l'encouragement.

Le fait de complimenter propose une appréciation positive, d'un dessin par exemple. Et complimenter à chaque dessin pourrait, selon certains professionnels de l'enfance, avoir un effet contre-productif, jusqu'à présenter une certaine pression sur l'enfant. Par exemple si l'enfant est complimenté systématiquement sur le fait de terminer son assiette, sur sa compétition de gym ou sur sa représentation au piano, il peut développer l'idée que, s'il échoue, il sera « moins aimé ». Eddie Brummelman, psychologue Néerlandais, explique que si vous dites à un enfant qui a une faible estime de soi qu'il a très bien réussi, il aura tendance à penser qu'il a l'obligation de très bien réussir, tout le temps, sous peine d'être « moins aimé » et à manifester chez lui de l'inquiétude à pouvoir satisfaire cette exigence, en renonçant à relever de nouveaux défis. Et comme le souligne Anne Cazaubon, auteure et coach, « le compliment ferme la porte à la discussion : on colle une étiquette et puis c'est tout. Ça n'invite pas au mouvement et au changement ».

Alors que, encourager, va plutôt faire progresser l'enfant. Rudolf Dreikurs, psychiatre autrichien, disait d'ailleurs que « l'encouragement est à l'enfant ce que l'eau est à la plante ». Commençons ainsi par remercier notre petit bout de son offrande. Un dessin confectionné est souvent un message, une confidence de l'enfant vers celui à qui il l'offre. Et l'encourager, comme nous le décrivions dans le chapitre précédent, serait de l'accompagner dans une démarche d'amélioration constructive. Et pourquoi pas solliciter sa « mécanique » en lui demandant comment il a fait fait pour réaliser ce joli dessin, pourquoi a-t-il utilisé telle ou telle couleur, que souhaiterait-il ajouter à son dessin ou ce qu'il aurait envie de faire ensuite... ?

Dans le cadre de la Communication Non Violente (méthode consistant à recherche un mode de communication positive), il est préférable d'apporter une observation sans évaluation. L'idée est de toujours décrire objectivement ce que l'on voit, sans interprétation personnelle, et y ajouter éventuellement son ressenti : « comment je me sens face à ce que j'observe ». Montrez à l'enfant que vous avez réellement observé son dessin, en lui donnant des détails sur les couleurs utilisées, les doigts qu'il a pris la peine d'ajouter, les détails que vous pouvez valoriser. Réagir uniquement en lui disant « c'est un très beau dessin » est une évaluation pure, un jugement, certes positif, mais un jugement tout de même. Cette notion n'apprend pas à l'enfant que la sensibilité peut être différente d'une personne à l'autre et que tout le monde n''aime pas les mêmes choses, lui y compris.

En synthèse, démontrez-lui que vous avez vraiment pris en compte son œuvre et laissez une porte ouverte sur sa création, de façon à favoriser le message que tout peut être amélioré, que la perfection n'existe pas et que ce n'est certainement pas ce que l'on attend de lui. Et enfin, complimentez l'enfant sur ses capacités, sa curiosité, sa créativité, sa logique, sa vivacité,... bref sur tout ce qui va lui donner envie de devenir meilleur, faire l'éloge des efforts qu'il déploie pour ce qu'il réalise. Et si vraiment le dessin réalisé vous laisse dans un profond désarroi, plutôt qu'un « c'est très beau » sans sincérité, préférez valoriser le travail de l'enfant toujours en décrivant les faits : « ce dessin a dû te prendre du temps, c'est un gros travail, félicitation pour ta persévérance » ou « j'aime te voir dessiner, réaliser des dessins avec autant de détails et je suis heureux/se car je sais que tu as très envie de réussir à dessiner les histoires que tu inventes. Tu dois être heureux/se aussi de constater tes progrès ? ».

Conserver toutes les productions des enfants ?

Et la question se pose également de transformer notre chez-nous en véritable hangar à archives de tous les dessins réalisés à la maison, en plus des productions de classe que les enseignants sont ravis de nous faire partager et de nous offrir après chaque trimestre...

Alors faut-il tout conserver pour faire plaisir à notre enfant ou peut-on jeter les œuvres au risque de provoquer un inconsolable chagrin ?

Ceci est plus une peur d'adulte en fait. L'enfant oublie la plupart du temps qu'il a réalisé un dessin et n'a pas ce souhait effréné de conserver absolument ses créations. Bien sûr si l'on lui demande, il ne va pas forcément être en accord avec une destruction en bonne et due forme de ses œuvres. Mais une fois l'échange entre vous et l'enfant réalisé au moment de la création, vous n'êtes pas obligé de garder le dessin plus de quelques semaines. Pour lui finalement, cela ne changera rien et ne redemandera jamais à revoir "son dessin". Ce n'est pas tout à fait identique pour les productions de fin d'année par exemple, ou pour la fête des mères/pères, pour lesquelles il est intéressant de réaliser, avec lui pourquoi pas, un petit album. Garder une trace de ses productions peut s'avérer plaisant quand, plusieurs années plus tard, vous redécouvrirez ensemble cet album. Vous pourriez également, surtout si l'enfant manque de confiance en lui, placer quelques uns de ses dessins dans certaines pièces comme dans sa chambre, dans le couloir, dans le salon... sans que cela ne pollue la décoration intérieure bien entendu.

Favoriser l'expression créative

Ainsi, pour créer les conditions favorables à la créativité et à la pratique du dessin chez l'enfant, il existe plusieurs techniques. Par exemple, vous pouvez instaurer un « moment créatif » hebdomadaire pour remplacer les écrans notamment. Vous pouvez également laisser à porter des enfants tout le matériel nécessaire à la pratique du dessin (crayons, feutres, peinture éventuellement, feuilles de papier, gommettes, …) et lui indiquer que cet « atelier » est à sa disposition quand il le souhaite.

Et s'il fallait s'étendre aux raisons pour lesquelles il est important de favoriser la créativité, nous vous conseillons cet article posté sur notre blog « Comment développer la créativité chez les enfants » : https://il-etait-une-box.fr/blog/comment-developper-la-creativite-des-enfants--b12.html

Sources documentaires : Atlantico.fr, cairn.info, aleteia.org, europe1.fr, magicmaman.com, topsante.com, zunzunblog.fr, doctissimo.fr, monenfantadupotentiel.com . Crédit photo : Freepik

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